Jeudi 12 septembre 2024, dans son émission sur Europe 1, en zélé porte-parole du patronat et du gouvernement, le chroniqueur devenu économiste Cyril Hanouna s’est permis de dire à une heure de grande écoute à ses « loulous » que « le plus gros problème en France aujourd’hui, c’est la Sécurité Sociale ».
Il appuie ses propos en disant se baser sur les propos de quelqu’un « qui n’est pas un fou », Sylvain Maillard, député LREM mais surtout personnage épinglé dans l’affaire des Pandora Papers (2).
Elle est loin la période où Cyril Hanouna devait bien être content de bénéficier de la solidarité nationale. Maintenant qu’il peut se payer des yachts, à bas la Sécu et vive l’évasion fiscale !
L’émission « complément d’enquête », diffusée sur France 2 en novembre 2023, a révélé que Cyril Hanouna refusait de rémunérer l'équipage avec un contrat français afin d'éviter de payer des cotisations sociales et se facturait à lui-même la location de son yacht à partir d'une société basée à Guernesey afin d'éviter d'avoir à débourser la TVA sur une facture de plus de 5 000 euros d'essence pour son bateau.
Le plus gros problème en France, ce n’est pas la Sécu mais plutôt ceux qui font tout pour ne pas payer d’impôts et cotisations sociales.
Mais ces attaques contre la Sécurité Sociale ne sont pas le fruit du hasard, mais calées sur un calendrier bien rodé.
En effet, la période correspond à celle de l’élaboration du projet de loi de financement de la sécurité Sociale pour 2025.
« Notre modèle social, c’est ça qui risque de faire réellement déraper les comptes publics dans les années à venir ». Bruno Lemaire, le ministre démissionnaire a explicité clairement la feuille de route du gouvernement nouvellement nommé lors de son audition en commission des finances le 9 septembre dernier. Les arrêts maladie sont entre autres la cause de tous les mots que traverse le pays.
Le déficit de la Sécurité Sociale ne vient pas des 80 milliards d’exonérations de cotisations, non il est dû aux Français malades !
Et pour étayer ses propos lors de cette audition, il a pu s’appuyer sur l’interview donné par Thomas FATOME, le Directeur de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie, donné le 8 septembre !
Et que dit le directeur de la CNAM ? Que le coût des arrêts maladie augmente cette année. 16 milliards d’euros.
Ce montant peut donner le tournis mais il est à relativiser. En effet, ce coût ne représente que 6.35 % du budget de l’Assurance Maladie (254 milliards de budget pour 2024).
De plus, il faut savoir que les indemnités journalières (IJ) sont des revenus de remplacement. Ces IJ sont calculées sur la base de votre salaire. Quand le SMIC augmente, le montant des IJ est revalorisé vu que celui-ci est calculé sur le salaire.
Il n’y a donc rien d’alarmant dans l’augmentation du coût des Indemnités Journalières.
FO est plutôt étonné de sa faible augmentation qui traduit le fait que les salaires n’ont pas augmenté comme ils devraient.
A la Sécurité Sociale par exemple, le personnel est toujours en attente d’une augmentation de la valeur du point.
Concernant l’augmentation du nombre des arrêts maladie, cela est peut-être dû à la réforme des retraites qui contraint les salariés à travailler plus longtemps que leur corps ne le permet.
Cette augmentation est peut-être aussi due au manque cruel de médecins sur le territoire. Les délais pour avoir un rendez-vous étant de plus en plus long (quand on peut trouver un médecin), certains assurés se retrouvent arrêtés du simple fait d’une non-prise en charge dans les temps.
Car si l’on se base sur les données CNAM, les arrêts sont, pour l’écrasante majorité, justifiés.
Sur la base de données de la CNAM que FO s’est procurées, sur l’année 2024, plus de 1.200.000 d’arrêts maladie ont été contrôlés par le service du contrôle médical pour 78000 avis de reprise du travail anticipés notifiés (reprise de travail ne voulant pas dire que l’arrêt n’est pas justifié).
Le problème n’est donc pas dans le fait que les gens soient en arrêt maladie.
Le problème vient du financement. La cour des comptes l’indique dans son rapport 2024 sur l’application des Lois de Financement de la Sécurité Sociale (LFSS).
A titre d’exemple elle indique que le poids des cotisations sociales est limité par le poids des allègements généraux, indexés sur le SMIC en précisant que « La hausse du Smic fait croître les exonérations pour tous les salaires inférieurs à 1,6 SMIC, ce qui freine mécaniquement l’augmentation des recettes de sécurité sociale ».
Cette même cour indique aussi que la Sécurité Sociale supporte de plus en plus la compensation des allégements de cotisations Unédic (chômage) et de retraite complémentaire.
Et ici, on ne revient pas sur les divers cadeaux faits sur le dos des travailleurs car les cotisations sociales c’est la part de salaire que les travailleurs versent dans le pot commun afin que tous les travailleurs et leur famille soient protégés contre les aléas de la vie.
Nous l’avons vu durant la crise COVID. Malgré tous les pillages des comptes de la Sécu, celle-ci (la Sécu) a pu rembourser les prestations, garantir un maintien de rémunération et se substituer à l’employeur lors de la mise en dispense d’activité.
Car oui, même avec des cotisations en moins, l’Assurance Maladie, c’est 254 milliards de budget.
La Sécurité Sociale (retraite, famille, maladie) représente un budget de 640 milliards d’euros!
Dans un contexte où à longueur de journée les médias distillent le discours de la quasi-faillite du pays, la Sécurité Sociale symbolise l’Eldorado !
Mais pour pouvoir définitivement mettre la main sur le magot de la Sécu, il faut s’attaquer aux ordonnances du 4 octobre 1945 et sur le code de la Sécurité Sociale.
Et l’attaque contre les arrêts maladie est le cheval de Troie pour la mise à mort de la Sécu de 1945 !
Pour pouvoir remettre en cause le droit aux arrêts maladie, il faut au gouvernement détruire tous les organes de la Sécu créés pour protéger les travailleurs et leur famille.
C’est pour préparer la fin des arrêts maladie et plus largement la protection des malades que le mercredi 18 septembre 2024, les salariés des DRSM (directions régionales des services médicaux) ont été informés de la manière la plus brutale de la disparition des services du contrôle médical.
Ce n’est pas un hasard si cette annonce intervient à ce moment. Le contrôle médical est indépendant des CPAM et donc de la CNAM et du Gouvernement car créé pour garantir les assurés contre les pressions du patronat qui confondent arrêts maladie avec vacances. Le rôle du contrôle médical est de se baser sur l’état de santé de l’assuré et non sur des injonctions économiques.
Le personnel des DRSM, conscient du danger que représente cette annonce a pris l’initiative d’appeler avec les syndicats FO, CGT et CFE-CGC à un premier jour de grève le jeudi 3 octobre 2024 pour dire non à la destruction du service médical !
Ils ont raison et la section fédérale Force Ouvrière soutient les collègues qui se mobilisent pour défendre le service médical et donc la Sécurité Sociale.
Force Ouvrière alerte l’ensemble des travailleurs sur ce danger qui prendra corps lors de la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité Sociale 2025.
Abandon du projet de suppression du service Médical
Abrogation des LFSS
Arrêt des exonérations des cotisations sociales
Pas Touche à la Sécurité Sociale de 1945 !
Paris, le 24 septembre 2024
(1) « Il faut réfléchir à un nouveau système d’indemnisation des arrêts de travail », interview de Thomas FATOME dans les échos du 8 septembre 2024.
(2) Cliquer sur ce lien pour voir l'article du Monde